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Utiliser la créativité comme béquille

Lionel Cretegny
Lionel Cretegny créativité

Suite à un accident de la route, je suis immobilisé pour des mois. Je décide de ne pas laisser ce temps se perdre. Grâce au livre de Julia Cameron, Libérez votre créativité, je découvre un chemin vers la guérison inattendu.

Un matin qui a tout changé

Nous sommes le 23 juillet, au matin. Je pars au travail à vélo. Je m’arrête en première position à un feu rouge ; une voiture se positionne derrière moi. Le feu passe au vert, je démarre. Dans mon rétroviseur, je vois que le conducteur n’a pas bougé. Il se fait klaxonner, redémarre brusquement… et me rentre dedans.

Très vite, alors qu’on me monte dans l’ambulance, je me dis une chose : je ne vais pas passer ma convalescence à regarder des séries (à part Tschugger...). 

Résultat : deux opérations, 21 vis et 2 plaques de titane — une sur le tibia pour reconstruire le genou, l’autre sur le radius, près du poignet. Me voilà en béquilles, un plâtre au bras, une attelle au genou. Je ne peux plus marcher, ni même couper ma viande. Je comprend que je vais être immobilisé encore plus longtemps que ce que j'imaginais, j’ai décidé fermement que ce temps ne serait pas perdu.


La découverte de "The Artist's Way" de Julia Cameron



Pendant les jours qui suivent, j’erre sur des sites de développement personnel, feuillette quelques livres… jusqu’à ce que je tombe sur Julia Cameron.

Julia Cameron est une artiste, écrivaine et réalisatrice américaine, connue dans le monde entier pour son livre culte The Artist’s Way (Libérez votre créativité en français).  
Publié en 1992, ce livre est devenu une référence pour tous ceux qui veulent réveiller l’artiste en eux et dépasser leurs blocages créatifs. 

     En vente ici en version poche

L’ouvrage se présente comme un cours de douze semaines, dont le but est d’aider chacun à retrouver sa créativité naturelle, celle que la peur, la honte ou le perfectionnisme ont parfois étouffée.


Un programme en 12 semaines


Chaque semaine explore un thème différent et propose des exercices concrets.  
Mais toute la méthode repose sur deux piliers essentiels :

  • Les pages du matin
  • Le rendez-vous avec l’artiste 
café et cahier

Les pages du matin


Les pages du matin, c’est simple : écrire trois pages, chaque jour au réveil, sans réfléchir, sans se relire, sans chercher à bien faire. On écrit ce qui nous passe par la tête, même si c’est juste :

 “Je ne sais pas quoi écrire.”

Je l’avais déjà essayé autrefois, sans contrainte de longueur. Mais au bout de quelques lignes, je bloquais toujours. Avec cette règle des trois pages, en revanche, impossible d’y échapper. Alors je remplis des lignes entières de « je ne sais pas quoi écrire »… jusqu’à ce que la lassitude s’installe. Et c’est à ce moment-là que quelque chose se débloque. Une personne en bonne santé ne peut pas, jour après jour, écrire les mêmes phrases ni décrire les mêmes états d’impuissance : « Je ne sais pas quoi écrire », « Je m’ennuie », « Je n’ose pas contacter X ». À force, une envie de changement, un élan d’action finit par surgir. Et c’est précisément là que réside la puissance de ce processus.

Très vite, je découvre que cet exercice est une forme de miroir :  
on y déverse ses doutes, ses frustrations, ses envies… et, à force, on finit par y trouver des réponses.

Je me pose souvent les mêmes questions et je n'avance pas:

  • “Qu’est-ce que je pourrais faire pour me sentir mieux ?”
  • “Comment donner du sens à ce qui m'arrive ?”  
  • “Quel est le but de ma vie ?”

Je décide d’ajouter une règle :

chaque fois que j’écris une question, je dois y répondre immédiatement, même si la réponse me semble idiote ou irréalisable.  

Et là encore, surprise : la plupart du temps, la réponse n’est pas si bête. Parfois même, elle me pousse à agir. Écrire tous les matins ce que j’ai en tête me permet de sortir du brouillard mental, de mettre mes idées en mouvement.  

C’est un exercice exigeant, surtout les premiers jours. Il y a des matins où ça ne vient pas, où la tête est vide. Alors je fais un schéma, un dessin, une liste — peu importe, tant que je ne garde pas tout dans ma tête. Petite précision : il ne faut jamais faire cet exercice le soir. Sinon, cela devient un bilan du jour, avec son lot de regrets.  
Le matin, au contraire, tout est encore possible. Et justement, écrire ce que l'on souhaite, de se dire que c'est impossible plusieurs jours de suite, puis de se lasser de cet état, force à changer. Un matin, je me dis "et pourquoi pas ?", puis "Et si j'essayais aujourd'hui ?". 


Le rendez-vous avec l’artiste


Le deuxième pilier du livre, c’est le rendez-vous avec l’artiste.  L’idée est simple : prendre chaque semaine un moment pour soi, seul, sans obligation, pour nourrir son imaginaire.

Cela peut être :

  • aller se promener en forêt,
  • acheter des crayons de couleur...
  • visiter un musée,
  • ou simplement flâner en ville.  

C’est un moment pour jouer, rêver, se faire plaisir.  
Pour renouer avec cette part de nous qu’on met souvent de côté.

Je l’avoue, cet exercice m’a été difficile. Avec mes blessures, mes déplacements étaient limités. Mais rien que d’y penser m’a fait du bien : c’est une invitation à se reconnecter à soi-même.

dessin collage

 

Les exercices et leur portée



Chaque semaine, le livre propose de nombreux exercices : questionnaires, lettres, réflexions, listes…

Certains m’ont particulièrement marqué, comme celui où l’on doit écrire une lettre à soi-même à 20 ans, puis une autre à 80 ans.  
Ou encore imaginer dix vies alternatives.  
Sur ma liste, j’ai mis “astronaute” et “médecin urgentiste à la REGA”.  
Ça change du bureau, effectivement. 😄

Ce que j’en retiens

Ce livre m’a profondément aidé. Il m’a appris que le résultat importe moins que le plaisir de créer. Julia Cameron nous invite à retrouver la spontanéité de l’enfance — celle qui nous faisait chanter, dessiner, danser, sans peur du jugement.

S’il y a une phrase que je retiens, c’est celle-ci :

“Je m’engage à fournir la quantité, l’Univers s’occupe de fournir la qualité.”

C’est tellement vrai. L’inspiration est capricieuse. Mais si on lui laisse de l’espace — si on crée, même imparfaitement — quelque chose finit toujours par émerger.  Et, à force, ce “quelque chose” devient beau.



En conclusion


Cette période de convalescence, que je croyais perdue, s’est transformée en un moment fondateur. Grâce à Julia Cameron, j’ai redécouvert le plaisir simple de créer sans attente, sans but, juste pour le plaisir.

Et finalement, c’est peut-être ça, la vraie guérison. 🌿



Lionel Cretegny

Lionel Cretegny

Je suis un curieux invétéré. J’aime créer, expérimenter, comprendre.  
Entre impression 3D, astrophotographie et photographie argentique, je passe mon temps à explorer des univers très différents… mais qui ont tous en commun le plaisir de faire, d’apprendre et de s’émerveiller.  
Ici, je partage mes réussites, mes ratés et tout ce que j’apprends en chemin — parce que c’est souvent dans l’erreur qu’on trouve la plus belle idée.